Achat d'un condo en Floride

Liquidation chez l’Oncle Sam

Guy Dubreuil a tracé sa feuille de route pour les prochaines années, et l’aiguille de sa boussole pointe résolument vers le Sud : il projette l’achat d’un condo en Floride. « Je voudrais le mettre en location pendant quatre ans, pour ensuite m’installer là-bas six mois par année, en prenant ma retraite », explique le Lavallois amateur de golf et de moto.

Mais reste-t-il encore de bonnes affaires chez l’Oncle Sam, maintenant que les prix de l’immobilier sont en hausse et que le dollar canadien fléchit? se demande-t-il.

Au cours des dernières années, la dégringolade des prix de l’immobilier, partout aux États-Unis et particulièrement dans le Sunshine State, conjuguée à un huard vigoureux, a permis à de nombreux Québécois de rafler une propriété sous les palmiers pour une bouchée de pain. La dolce vita sous des cieux plus cléments n’était désormais plus l’apanage des riches.

« L’an dernier, on pouvait trouver des condos pour moins de 30 000 $ qui valaient 100 000 $ quelques années auparavant, souligne Yves Beauchamp, agent immobilier et propriétaire du journal Le Soleil de la Floride. La moitié des gens qui ont acheté au cours des dernières années n’auraient pas eu les moyens d’acheter avant la crise. »

Dans le parcours en montagnes russes qui secoue le prix des propriétés américaines depuis quelques années, la Floride occupe le wagon de tête. C’est dans cet État que les prix ont grimpé le plus vite et le plus haut, au milieu des années 2000, pour ensuite plonger de façon vertigineuse, en 2011. Puis, le manège a repris son élan : la valeur des propriétés est maintenant repartie à la hausse.

« La Floride a été plus touchée que tous les autres États par la bulle immobilière, explique Francis Généreux, économiste pour Desjardins. Les prix ont triplé entre 2000 et 2006. La chute a donc été plus brutale qu’ailleurs aux États-Unis. »

Un grand nombre de propriétaires se sont retrouvés en difficulté, et la Floride s’est transformée en immense « liquidation ». Les acheteurs de partout dans le monde se sont précipités pour mettre la main sur les meilleures aubaines, dont un grand nombre de Canadiens.

C’est d’ailleurs ce qui a stimulé la reprise du marché immobilier. « Des propriétés se vendent au-dessus du prix demandé, parce qu’il y a parfois des offres multiples sur la même propriété », raconte Jean Feuillet, agent immobilier dans la région de Fort Lauderdale.

Les meilleures aubaines sont sans doute passées. Le dollar canadien en baisse contribue aussi à augmenter le coût d’achat : pour une propriété de 150 000 $, la variation de notre devise représente une dépense supplémentaire de 14 250 $ comparativement à 2012.

Des trésors à trouver

Doit-on conclure que le train est passé et que ceux qui sont restés sur le quai n’ont qu’à rester chez eux, dans le froid ? Pas nécessairement.

« Vous ne tomberez peut-être pas sur l’aubaine du siècle, les occasions en or sont un peu plus difficiles à dénicher, mais il y en a encore, dit Yves Beauchamp. Même si les prix ont augmenté, il y a encore de bonnes occasions. »

« Malgré la baisse du dollar canadien, les acheteurs savent qu’ils font quand même une bonne affaire, ajoute Jean Feuillet. Un condo construit dans les années 80 qui se vendait alors 100 000 $ se vend maintenant 120 000 $. Avec l’inflation, c’est comme s’il coûtait 40 000 $ en dollars de 1980. »

La valeur des propriétés continuera d’augmenter, mais à un rythme plus lent. « On ne s’attend pas à revenir aux mêmes prix qu’avant la crise avant plusieurs années », précise Francis Généreux. Quant au dollar canadien, les experts ne s’attendent pas à d’importantes fluctuations de sa valeur dans les mois à venir.

« Les Québécois qui achètent pour en profiter eux-mêmes pendant plusieurs années et non pour investir ne devraient pas avoir de craintes. L’important, c’est de payer un prix qui convient à leur budget, souligne M. Généreux. Mais ceux qui achètent en pensant faire un coup d’argent prennent peut-être des risques. »

Il souligne notamment que le marché immobilier de la Floride est encore aux prises avec un grand nombre de maisons saisies par les banques, et que le tiers des hypothèques sont supérieures à la valeur de la propriété ; les propriétaires qui vendent n’obtiennent donc pas un prix suffisant pour rembourser leur hypothèque.

Jean Feuillet met en garde les acheteurs qui pourraient se laisse tenter par des condos annoncés à des prix dérisoires, notamment ceux qui sont vendus par les banques : ils sont peut-être en mauvais état, ou situés dans des secteurs peu recommandables. « Les très bas prix ont attiré d’autres types d’acheteurs, la démographie a changé dans certains quartiers, et ce n’est peut-être pas ce que les snowbirds québécois recherchent », dit-il.

Sylvie Champagne, une Montréalaise qui a acheté un premier condo dans la région de Fort Lauderdale en 2006, observe que les secteurs prisés des Québécois sont quelque peu protégés des sursauts du marché immobilier. « Les critères de ces acheteurs ne sont pas les mêmes que ceux des acheteurs traditionnels, souligne-t-elle. Bien des retraités québécois recherchent des complexes immobiliers où ils pourront parler français, ce qui soutient la demande dans ces secteurs. »

Endroits préférés des acheteurs canadiens 

Naples–Marco Island : 13 %

Cape Coral–Fort Myers : 12 %

Orlando–Kissimmee : 12 %

Brandenton–Sarasota–Venice : 10 %

Fort Lauderdale : 8 %

Tampa– Saint Petersburg–Clearwater : 8 %

Palm Beach : 6 %]

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